Danse (et contredanses) du Sabre d’Aram Khatchaturian

Il fut un temps où l’on jouait au foot dans le Donbass. Une époque pas si lointaine où l’attaquant arménien Henrikh Mkhitaryan mettait le feu au Donbass Arena, le sanctuaire de l'un des meilleurs clubs de foot d’Ukraine : le Shaktar Donetsk. A chaque fois que ce joueur arménien marquait un but à domicile, les haut-parleurs du stade et les supporters entonnaient le thème de la Danse du Sabre de son compatriote Aram Khatchaturian.

Cette danse est de loin la partition la plus célèbre de Khatchaturian. Composée en 1942, elle est inspirée d’une danse traditionnelle arménienne où l’on agite des sabres. Avec son incroyable dynamisme, son rythme entêté et ses sonorités étonnantes comme celle d’un saxophone soliste, la Danse du Sabre a très vite connu un grand succès qui a dépassé les frontières arméniennes et russes. En 1948, c’est à dire à peine six ans après sa composition, le jazzman américain Woody Herman, connu notamment pour avoir créé l’Ebony Concerto de Stravinsky enregistrait une version très swing de la partition de Khatchaturian.

Cette reprise de 1948 est la toute première d’une longue série qui ne fera qu’accroître la popularité de la Danse du sabre. En effet, dès les années 50, on retrouve plusieurs arrangements de cette musique pour orgue avec notamment Virginie Morgan mais aussi des versions pour accordéon avec Jean Freber et son ensemble musette ou encore cette reprise délicieuse de la très virtuose Yvette Horner.

C’est peut-être parce qu’elle permet aux musiciens de montrer toute leur vélocité et qu’elle possède dans son essence un caractère populaire et dansant que la Danse du Sabre de Khatchaturian est autant reprise par des musiciens non-classiques. Si vous n’êtes pas trop amateur d’accordéon et que vous préférez les guitares électriques alors votre coeur penchera peut-être plus pour celle plus métal du groupe Skyclad ou pour la version live du "guitar hero" Dave Edmunds.

Reprise par Ekseption, un groupe néerlandais de rock progressif spécialisé dans les arrangements d’airs classiques ou samplée par les rappeurs français Explicit Samouraï en 2004, ce que l’on constate c’est que la Danse du Sabre de Khatchaturian résiste effectivement à toutes formes de métamorphoses.

Et de toutes les versions possibles et inimaginables qui existent de la Danse des Sabre, peut-être que ma préférée est celle, plus sage, du groupe Les Yeux Noirs car elle revient finalement aux origines traditionnelles de cette danse que Khatchaturian, parait-il, ne portait pas tant dans son coeur, car il estimait, à juste titre, qu’elle occultait le reste de son oeuvre.