Les sonorités magiques de la harpe : de Berlioz à Dorothy Ashby

Il était une fois. C’est ce que semble vouloir nous dire ces notes de harpe extraites du Shéhérazade de Nikolaï Rimski-Korsakov. Dans cette suite pour orchestre composée en 1888, la conteuses des Mille et une Nuits est incarnée par ce thème de violon et son récit sans paroles ponctué par quelques arpèges de harpe nous donnent à voir une scène explicite. On imagine Shéhérazade enchanter le grand vizir en s’accompagnant d’une harpe, comme les poètes grecs de l’Antiquité qui, dit-on, chantaient des poèmes accompagnés d’une lyre.

La lyre d’Orphée peut vaincre la mort et le jeu d’Apollon. C’est sur cet instrument dédié à Dieu que le Roi David compose ses psaumes tandis que les bardes chantent des poèmes épiques en s’accompagnant de harpes celtiques. Tous les enfants savent aussi que c’est une harpe enchantée qui endort Touffu dans Harry Potter. C’est dire à quel point, hier comme aujourd’hui cet instrument est associé à la magie et au fantastique. La harpe est capable, selon Berlioz, de murmurer « les plus doux secrets, des idées gracieuses et féériques ». On ne peut que lui donner raison en écoutant la harpe ensorceleuse du Spectre de la Rose, qui apporte un caractère fantomatique au Bal de la Symphonie Fantastique et qui nous plonge dans un monde lointain et merveilleux lorsque Dorothy Ashby chantent des poèmes médiévaux du Persan Omar Khayyam.

Dorothy Ashby, une harpiste virtuose qui a élargi le répertoire de cet instrument en composant des airs mêlant le jazz, la soul et les musiques du monde et à laquelle Stevie Wonder fait appel le temps d’un titre en apesanteur extrait de l’album Songs in the Key of Life sorti en 1976.

Comment évoquer le surnaturel dans une chanson intitulée If it’s Magic ? En utilisant une harpe bien sûr ! L’ingrédient onirique, classe et classique de ce titre de Stevie Wonder mais aussi de cette romance pop baroque des années 60…. La harpe lancinante qui accompagne les voix de John Lennon et de Paul Mac Cartney est l’ingrédient nostalgique et féérique de She’s Leaving Home. En écoutant cette balade romantique, on croirait entendre une mélodie traditionnelle sans âge, une de ces légendes que l’on chante depuis la nuit des temps en s’accompagnant d’une harpe.