Jacob Artved fait swinguer Ravel, Poulenc et Debussy

Derrière cet arrangement de la Forlane, extraite du Tombeau de Couperin de Maurice Ravel se cache Jacob Artved. L’une des étoiles montantes de la scène de jazz danoise. Après avoir été le plus jeune musicien jamais admis au Conservatoire royal de Copenhague à 15 ans seulement, il est parti dans la Ville Sainte du Jazz, New-York à 18 ans où il a usé ses doigts dans les jam-sessions, parfait sa technique et rencontré un grand nombre de musiciens avant de revenir au Danemark enregistrer ce très beau disque sorti récemment chez le label Stunt.

Après avoir enregistré un album live au club Montmartre de Copenhague avec le grand batteur américain LouisHayes et sorti un premier disque studio intitulé Wax up !, le guitariste se lance dans un crossover réussi en faisant un peu comme Ravel en son temps avec le Tombeau de Couperin. Là où Ravel rendait hommage à la musique français du 1e siècle et notamment celle de Couperin en la mettant au goût du jour avec des harmonies modernes, Jacob Artved réinterprète trois extraits de cette suite en version jazz moderne. La Forlane, le Menuet et le galopant Prélude.

Un prélude de Ravel qu’il joue en duo avec un hautboïste nommé Max Artved et qui n’est autre que le père du guitariste. D’ailleurs, le fait que Jacob Artved conserve le timbre agreste et léger du hautbois présent dans la partition originale de Ravel nous en dit long sur le grand respect que le guitariste nourrit pour la musique classique. En l’arrangeant pour cordes, basses, batterie, percussions et piano, le guitariste souligne les points communs qui peuvent exister entre le jazz d’aujourd’hui et certains phrasés et enchaînement d’accords de partitions du vingtième siècle.

Prenez le début de Poissons d’Or, extrait des Images de Debussy. Accélérez le balancement des deux accords, du début, rajoutez une batterie qui accompagne le thème joué à la guitare dans un rythme de samba rapide et vous en oublieriez presque que c’est une pièce de Debussy.

Que ce soit dans un medley façon suite pour orchestre du Roméo et Juliette de Prokofiev, dans sa reprise de la Danse Arabe de Casse-Noisette signée Tchaïkovski ou un hommage à Francis Poulenc, on devine la démarche humble et très réussie de Jacob Artved. Aucun coup de com’ ici, il ne s’agit pas d’un patchwork de citations cosmétiques de thèmes classiques mais bel et bien de recompositions qui témoignent de quelque chose de rare dans le crossover : de bon goût.