Cette semaine, cinq bandes son de leur époque. Cinq albums enregistrés qui bousculèrent l’ordre établi. On sortait des années exploratoires du free jazz et les révolutions musicale les plus conséquentes n’étaient vraiment pas là où on les attendait.
Au sommaire aujourd'hui
- Paul Bley à la Une
🎷 Première avancée, la revendication d’une autonomie artistique du Tiers-Monde vis-à-vis de la norme étasunienne : le « Bolivia » de Gato Barbieri poursuit l’aventure amorcée par « The Thirld World » en 1969. Gato l’Argentin dessine une géographie du « pueblo unido jamas sera vencido » : un axe Cuba, Brésil, Bolivie, Argentine… Les bretons, les norvégiens et les sardes n’auront plus de complexes.
🎹 Seconde percée, la révolution intérieure, celle des sentiments, à contre-sens total des revendications sociétales. Quand Paul Bley enregistre un frissonnant « Open to Love » en solitaire, on croit rêver : lui l’un des acteurs de la « révolution d’octobre » du jazz new-yorkais huit ans plus tôt, lui qui libéra le trio piano-contrebasse-batterie de tous les carcans rythmiques ou harmoniques ! Et voilà qu’il ouvre un boulevard aux piano-solos de Keith Jarrett.
Dans sa série ecmreviews.com, Tyran Grillo écrit :
« Dans la foulée du diptyque de Chick Corea pour ECM, et certainement pas en reste, Paul Bley propose ce très grand moment de piano solo. Faute d'une meilleure analogie : si les improvisations de Corea ressortaient d’un grand dîner de famille, l’approche de Bley en serait la tarte au citron meringuée du dessert. Chaque plage ne raconte pas tant une histoire qu'elle essaie de nous faire savourer ses détails les plus fins. Paul Bley semble parfois annoncer Keith Jarrett (ou est-ce l'inverse ?), car parfois sa voix se glisse avec un clin d’œil à l'exubérance de ce dernier. Il pince et gratte directement les cordes à l'intérieur du piano sans en abuser et avec tact, ajoutant un fine touche métallique à son jeu foncièrement cristallin. Bley cajole nos oreilles bienveillantes et nous donne envie de plus de ses sons doux. L'album ne semble jamais s'égarer, même si les mélodies linéaires sont parfois difficiles à repérer. Ces pièces sont bouleversantes de sincérité et sa version du Ida Lupino" de Carla Bley est sublime. »
🎺 Troisième tremblement de terre, l’éruption d’un ovni annoncé un peu plus tôt par « Bitches Brew ». Cette fois, avec « On the Corner », Miles Davis ne se contente pas d’électrifier le propos, il concocte un cocktail explosif, une fusion au plein sens du terme où Sly Stone et James Brown sont aussi influents que Karlheinz Stockhausen et Ornette Coleman. C’est rugueux, sale, insolent, rebelle. Désormais le funk ne quittera plus le Prince des Ténèbres.
🎹 Quatrième saut dans l’inconnu, l’un des albums les plus ambitieux et méconnus de Keith Jarrett : « Expectations ». Son titre est pourtant explicite, « les attentes ». Jarrett y augmente son brillant quartet américain d’une guitare, de percussions et surtout d’un ensemble de vents et de cordes. L’écriture bouscule les frontières esthétiques, le jeu des solistes est un ballet de feux follets. Rassemblant toutes les pièces de son puzzle, Jarrett propose paradoxalement une tabula rasa excitante.
🎹 Dernier volet, l’irruption de continents lointains, avec leurs instruments et leur propre spiritualité, dans l’univers afro-américain. C’est l’ancien pianiste du Coltrane mystique qui s’y colle, McCoy Tyner, avec « Sahara », son premier album chez Milestone. Il y joue du koto, de la flûte, des percussions et s’inspire de mélopées africaines et de couleurs japonisantes. En se décentrant, le jazz retrouve une raison d’être et légitime son universalité. Jazzmen de tous les pays, réunissez-vous…
Programmation musicale
- 18h07
Ida Lupino Paul BleyIda LupinoCarla Bley. (Compositeur), Paul Bley (piano)
Album Open, to Love (1973)Label ECM (827751-2) - 18h16
Harlem Paul BleyHarlemPaul Bley. (Compositeur), Paul Bley (piano)
Album Open, to Love (1973)Label ECM (827751-2) - 18h21
Open, to Love Paul BleyOpen, to LoveAnnette Peacock. (Compositeur), Paul Bley (piano)
Album Open, to Love (1973)Label ECM (827751-2) - 18h29
Georgian mood Macha GharibianGeorgian moodAlbum Joy Ascension (2019)Label Meredith / Rue Bleue (BLC19014CD) - 18h34
Dolce David Aubaile & Frédéric DevilleDolceFrédéric Deville. (Compositeur), David Aubaile (piano), Frédéric Deville (violoncelle)
Album Dolce Ostinato (2021)Label Tchaï (TCHCD003) - 18h36
The sidewinder Cecil L. RecchiaThe sidewinderLee Morgan
Album Play blue (2021)Label HARPO - 18h40
Lya Yonathan AvishaiLyaYonathan Avishai. (Compositeur), Yonathan Avishai (piano), Yoni Zelnik (contrebasse), Donald Kontomanou (batterie)
Album Joys and Solitudes (2018) - 18h44
Fire Samy ThiébaultFireSamy Thiébault. (Compositeur), Samy Thiébault (saxophone ténor), Brian Lynch (trompette), Eric Legnini (piano éléctrique), Manuel Valéra (piano), Jose Gola (basse), Yunior Terry (contrebasse), Dafnis Prieto (batterie), Anne Cecile Cuniot (flute), Hélène Gueuret (hautbois), Camille Lebrequier (cor), Cécile Hardouin (basson), Bastien Stil (tuba), Cesar Poirier (clarinette), Clara Abou (violon)
Album Awé ! (2021)Label Gaya (GAYA053) - 18h48
A Mood Jazz Station Big BandA MoodSteven Delannoye. (Compositeur), Stéphane Mercier (saxophone alto, flûte, direction artistique), Daniel Stokart (saxophones, flûte), Steven Delannoye (saxophone ténor), Vincent Brijs (saxophone baryton), Loïc Dumoulin (trompette, bugle), Pauline Leblond (trompette, bugle), Jean-Paul Estiévenart (trompette, bugle), Peter Delannoye (trombone), David De Vrieze (trombone), Bart De Lausnay (trombone basse), François Decamps (guitare), Vincent Bruyninckx (piano, claviers), Boris Schmidt (contrebasse), Toon Van Dionant (batterie)
Album Moods (2021)Label Hypnote (HR020) - 18h52
Friends With Monsters Nishla SmithFriends With MonstersNishla Smith. (Compositeur), Nishla Smith (voix), Aaron Wood (trompette), Richard Jones (piano), Joshua Cavanagh-Brierley (contrebasse), Johnny Hunter (batterie, percussions)
Album Friends With Monsters (2021)Label Whirlwind (732871)
L'équipe
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