L’organiste et compositeur Charles-Marie Widor (1844-1937) qui fut professeur au Conservatoire de Paris, est l’un des plus grands interprètes français de la musique d’orgue de Bach dont il s’inspire à la fois dans ses compositions ("Bach’s Mémento" 1925) et dans la technique de son jeu instrumental.
« Bach jouait ainsi du clavecin : “Les cinq doigts recourbés de manière à faire tomber perpendiculairement leur extrémité sur le clavier, au-dessus duquel ils formaient une ligne parallèle, toujours prêts à obéir. Le doigt ne se levait pas perpendiculairement en quittant la touche, mais se repliait plutôt en glissant vers la paume de la main ; dans la transition d’une touche à l’autre, la glissade servait à communiquer au doigt voisin la quantité exacte de pression employée par le doigt précédent ; de là, une grande égalité, un toucher ni empâté, ni sec.” C’est Carl Philipp Emanuel qui nous l’apprend.
Bach avait la main relativement fort petite ; le mouvement de ses doigts était à peine perceptible, les premières phalanges remuant seules. Sa main conservait la forme arrondie, même dans les passages les plus difficiles, dit son premier biographe Forkel ; les doigts s’élevaient fort peu au-dessus du clavier, à peine un peu plus que dans le trille ; dès qu’un doigt cessait d’être employé, il avait soin de le replacer dans la position règlementaire. “Les autres parties de son corps ne prenaient aucune part à son exécution, contrairement à ce qui arrive à beaucoup de gens dont la main n’a point une agilité suffisante”.
Aujourd’hui nous ne jouons plus le clavecin, et le piano, qui l’a avantageusement remplacé, exiges des moyens insoupçonnés jadis. Mais en ce qui concerne l’orgue, rien n’a changé dans l’art de le toucher depuis deux siècles. Peut-être les doigtés de la pédale de Bach étaient-ils un peu différents des nôtres ; sans doute, dans sa jeunesse, se servait-il beaucoup moins du talon que de la pointe, alors que les touches des pédaliers étaient extrêmement courtes. Il jouait, le corps un peu penché en avant, immobile, avec un rythme admirable, un ensemble polyphonique absolu, une merveilleuse clarté, pas vite, maître de lui-même et pour ainsi dire du temps, donnant l’idée d’une incomparable grandeur. […]
Non. L’art de jouer de l’orgue n’a point changé depuis Jean-Sébastien Bach, même si nos orgues se sont singulièrement améliorées. »
SOURCE :
Charles Marie Widor, Préface (1894) de l’ouvrage d’André Pirro, L’orgue de Jean-Sébastien Bach, Paris, Librairie Fischbacher, 1895.
♫ Charles-Marie WIDOR
Bach’s Memento / Six pièces pour orgue (1925)
Pastorale, flûte et hautbois
Denis Tchorek, orgue
Orgue Mutin-Cavaillé-Coll de la collégiale Saint-Pierre de Douai (Nord)
Disque : Hortus 148 (2017)
Programmation musicale
- 07h51Jean-Sébastien BACH / Frank VIGNOLA (Compositeur)Gypsy Bach
, Frank Vignola,
- 07h57
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