Étudiants en musicologie et en médiation culturelle à l'ère du Covid : la double peine

Les étudiants du Master en musicologie et ingénierie des musiques actuelles, à l'université d'Evry.
Les étudiants du Master en musicologie et ingénierie des musiques actuelles, à l'université d'Evry. ©Radio France - Louis-Valentin Lopez
Les étudiants du Master en musicologie et ingénierie des musiques actuelles, à l'université d'Evry. ©Radio France - Louis-Valentin Lopez
Les étudiants du Master en musicologie et ingénierie des musiques actuelles, à l'université d'Evry. ©Radio France - Louis-Valentin Lopez
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Pas de concert, de festival, ni de spectacle... Difficile dans ce contexte pour les étudiants en musicologie et en médiation culturelle d'apprendre les ficelles du métier. Certains ne se sentent même plus légitimes à exercer.

À l'Université d'Evry, au sud de Paris, d'énormes écrans d'ordinateurs et des claviers de piano sont alignés dans une petite salle. Ici, les étudiants peuvent revenir un peu à la fac, depuis début mars. Un soulagement pour les élèves du Master 2 en musicologie et ingénierie des musiques actuelles, qui commençaient à se lasser des cours à distance : "Faire les cours depuis un ordinateur, ce n'est pas très concret. Par exemple, difficile de faire un cours de pédagogie où il faut enseigner le chant par ordinateur, avec une connexion défaillante", souligne Graham. "Chanter en polyphonie sur zoom, c'est très drôle aussi", abonde Baptiste, rieur.

Mais lorsqu'on demande à Baptiste ce qu'il compte faire après son Master, sa mine s'assombrit. "À la base je voulais faire du mixage, de la composition. Puis, j'ai vu la crise. Je me suis dit que ce n'était pas possible, qu'il valait mieux une solution de secours." Résultat : le jeune homme souhaite devenir professeur, valeur plus sûre au vu d'un secteur culturel toujours à l'arrêt.

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"On rate des opportunités de stage"

De l'autre côté de la cour, les étudiants en Master d'administration de la musique et du spectacle vivant viennent assister à l'un de leurs rares cours en présentiel. Pour eux, les cours à distance sont moins gênants, car les matières sont plus théoriques. Mais il y a tout de même tout un volet pratique, qui manque aux étudiants : "Le fait d'être en permanence à distance, ça complexifie forcément tous les projets qu'on doit mettre en place. Notamment des projets de conduite culturelle : c'est particulièrement complexe de s'organiser pour se voir", déplore Déborah. "C'est aussi dommage car on rate des opportunités de stage, il n'y a rien dans le spectacle vivant, presque rien", complète Éva. 

Même ressenti pour Marie-Léa, étudiante en licence production et administration des musiques actuelles (Apama) à Metz. L’université a même proposé à sa promotion de redoubler pour pouvoir faire un stage, et la jeune femme se pose beaucoup de questions. "À la base, cette année était prévue pour nous professionnaliser dans le milieu. Pouvoir faire de vrais concerts, gérer de vrais artistes, avoir des intervenants pour nous encadrer et être sur le terrain, commencer à s’intégrer dans le milieu professionnel", égrène-t-elle. "Au lieu d’avoir l’impression d’être insérée dans le milieu professionnel, j’ai même l’impression d’avoir régressé. Je ne fais plus rien avec mes associations, alors que normalement on fait tous partie d’associations dans ce genre de licence, où on manage déjà des artistes."

Là on a tous un peu l’impression de ne plus être légitimes à travailler dans le milieu, parce qu’on ne fait plus rien. Aujourd’hui je ne pourrais même plus vous dire comment faire un concert, par exemple" - Marie-Léa

L'invité du jour
28 min

"On ne s'attendait pas à avoir une licence un peu au rabais"

"Avec beaucoup de mes camarades, on rêvait de faire la licence depuis des années. On ne s’attendait pas à avoir une licence un peu au rabais, malheureusement", poursuit-elle : "Le temps que les associations et que les entreprises remontent la pente, il se passera 4 voire 5 ans. Et nous on aura peut-être déjà abandonné le projet de travailler dans les musiques actuelles d’ici là." Comme certains de ses camarades, Marie-Léa compte trouver un petit boulot et mettre la musique entre parenthèses. Un crève-coeur pour la jeune femme, qui rêve d'organiser des festivals. 

Mais il y a des exceptions comme Hortense, qui étudie l'administration et la gestion de la musique à Saint-Étienne : "J’ai eu la chance de faire un projet personnel mais dans un lycée, parce que c’est le seul endroit où j’ai réussi à faire jouer des musiciens", confie-t-elle, grand sourire. "Ça a été un grand luxe de les faire jouer, de leur faire signer des contrats. Une enseignante a été très enthousiasmée par mon projet, elle m’a dit 'on y va'. J’ai la chance d’avoir le moral parce que les musiciens ont joué, et qu’ils vont rejouer encore en mai dans ce lycée." 

Les perspectives d’avenir ont été réduites énormément. Le secteur culturel a toujours été un secteur difficile au niveau de l’insertion professionnelle, et là les perspectives sont d’autant plus noires, puisqu’on ne sait pas où on va pouvoir être inclus" - Hortense

Comme ses camarades, Hortense essaie de ne pas trop penser à l'avenir, de vivre au jour le jour, dit-elle. Mais une fois le Covid loin derrière nous, pourquoi pas réaliser son rêve : ouvrir un club de jazz. 

Programmation musicale

  • 07h46
    TRI YANN Si mort a mors
    HUBERT SOUDANT (Chef d'orchestre)
    TRI YANN Si mort a mors

    , TRI YANN, ORCHESTRE NATIONAL DES PAYS DE LA LOIRE

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