Une fiction en huit épisodes, disponible ce mardi sur la plateforme OCS, dépeint le quotidien et les péripéties de la compagnie de ballet de l'Opéra de Paris. Avec des actrices qui se sont investies corps et âme dans leurs rôles.
Une plongée dans l'une des institutions artistiques les plus prestigieuses au monde. C'est ce que propose la série française "L'Opéra", disponible dès ce mardi sur la plateforme OCS. Une fiction de huit épisodes, qui décrit le quotidien et les péripéties de la compagnie de ballet de l'Opéra de Paris. La série est portée avec brio par Raphaël Personnaz, qui incarne un jeune directeur de la danse ambitieux (inspiré de Benjamin Millepied), et aussi par des actrices, Ariane Labed et Suzy Bemba en tête, qui se sont investies corps et âme dans leurs rôles.
Entre 4h et 8h de danse quotidienne
Être danseur, ça ne s'improvise pas. Pour rentrer dans leurs chaussons, les comédiennes ont suivi un entraînement très rigoureux. Suzy Bemba, qui incarne une jeune surnuméraire - c'est à dire une danseuse remplaçante du corps de ballet - n'a pas ménagé ses efforts. "J’ai commencé par des répétitions de danse, je n’ai pas eu tout de suite cette ambiance de tournage. Pendant les deux mois de répétition, j’avais plus l’impression de préparer un spectacle que de me préparer à tourner", raconte-t-elle à France Musique : "J’avais dansé tous les jours, entre 4h et 8h, soit toute seule avec la professeure de danse, soit en groupe avec tous les danseurs figurants de la série. J’avais un peu l’impression d’être dans une compagnie de danse, d’avoir cette énergie de troupe."
Mon personnage, Flora, est une danseuse prodige de 19 ans. Elle est arrivée à la danse assez tard dans sa vie, mais a réussi à rattraper son retard et avoir un niveau qui lui permet d’être surnuméraire à l’Opéra de Paris, c’est-à-dire qu’elle est remplaçante : dès que quelqu’un se fait mal, elle peut être appelée pour le remplacer. Elle va passer toute la saison 1 à apprendre toutes les chorégraphies, à travailler d’arrache-pied pour s’intégrer dans ce milieu, sans être vraiment sûre de danser sur scène un jour" - Suzy Bemba
Mais les répétitions ont été quelque peu perturbées par la crise sanitaire : "On a été arrêtés de mars à juillet. On est tous rentrés chez nous, mais tous les matins, on avait des classes de danse par l'application zoom, à 10h." Ce qui a pu donner lieu à des situations assez insolites, comme "faire des barres dans sa cuisine", abonde Ariane Labed, qui incarne une danseuse étoile.
"Il a fallu prendre soin des acteurs"
Tout cela sous la houlette d'Astrid Boitel, ancienne élève de l'école de danse de l'Opéra de Paris, aussi directrice artistique sur la série. "L’enjeu était d'apprendre aux comédiens du matériel chorégraphique très poussé, et en même temps de leur apprendre, ou réapprendre, les bases. Ce qui est assez difficile, car ils devaient tout faire en même temps, la charge mentale était conséquente", décrit celle qui a assisté durant sept saisons Élisabeth Platel à l'école de danse de l'Opéra : "Dans notre casting, on a des comédiens dont certains avaient des formations classiques, et d’autres absolument pas le profil de danseurs professionnels. Il a fallu en prendre soin, avant tout, parce que c’est un métier. J’ai fait une préparation en amont pour cibler les risques de blessure notamment, et ils ont eu un suivi avec un kiné qui suit aussi les danseurs de l’Opéra."
On a démarré par une reprise physique et un entraînement doux, pour que les muscles se réhabituent au travail du classique. Petit à petit, on a intégré des difficultés techniques. Il y avait beaucoup de choses à apprendre. Une grosse écoute, aussi, pour qu’il n’y ait pas de panique, car on ne s’invente par danseur en deux mois et demi" - Astrid Boitel
"Il fallait aussi les freiner. Les comédiens ont été extrêmement investis, je me suis retrouvée plusieurs fois à leur demander de souffler, de ne pas pousser parce qu’on était trop proches des blessures. Il y a eu un renversement à un moment où mon discours n’était plus de les faire progresser mais de les freiner un peu dans l’investissement physique", poursuit la directrice artistique. Tout cela en collaboration avec deux chorégraphes : Marc-Emmanuel Zanoli de l’Opéra de Bordeaux, pour toutes les parties classiques, et Julien Ramade pour les chorégraphies contemporaines.
La série nous plonge aussi dans les arcanes administratives de l'Opéra de Paris. Grâce à Raphaël Personnaz donc, qui incarne Sébastien Cheneau, le nouveau directeur de la danse, mais aussi grâce à Typhaine, son assistante hyperactive. "J'ai regardé à peu près tous les documentaires possibles sur l'Opéra, son fonctionnement, que ce soit celui du ballet ou de l'administration", raconte Sarah Le Picard, l'interprète de Typhaine : "Un film, notamment, qui avait été fait sur Benjamin Millepied. Et j'ai cherché en moi l'énergie d'une assistante avec autant de responsabilités, car c'est la petite fourmi qui fait que tous les rouages s'enclenchent d'une bonne façon. Si elle n'est pas là, tout s'écroule, puisqu'elle fait le lien entre tous les services et connaît absolument tout de l'Opéra."
Un "Lac des Cygnes" périlleux
Sur scène, les comédiennes sont parfois doublées, pour une crédibilité optimale. "Les deux comédiennes, Suzy Bemba et Ariane Labed, avaient une doublure chacune. Ariane pour les grosses parties techniques, sur pointes. Notre but est de raconter l’Opéra de Paris, le niveau des danseurs est incroyable. Pour la crédibilité, on était obligés de doubler les grosses parties techniques", souligne Astrid Boitel, la directrice artistique. Mais l'exigence artistique est bien là. Pour Ariane Labed, qui a arrêté la danse à l'adolescence, le plus grand défi a été d'interpréter Odette dans le Lac des Cygnes : "Je n’en danse que quelques petites minutes mais c’est un ballet très difficile, notamment parce qu’on est très longtemps sur la même pointe, le pied gauche. Les gestes se répètent énormément, les façons de se mouvoir sont assez spécifiques, le mouvement des ailes notamment est très dur à attraper. Prendre cette place de reine des cygnes, j’étais presque gênée de faire ça face à des danseuses professionnelles. Il faut l’assumer."
Ça a été un bonheur, mais je ne peux pas dire que ça a été facile. Ça a été accompagné de beaucoup de douleurs, et d’une grande crainte de ne pas être à la hauteur" - Ariane Labed
D'où est venue l'idée de cette série sur l'Opéra ? "J’avais l’intuition, qui a été confirmée par la suite, qu’on tenait avec l’Opéra une arène particulièrement payante visuellement, extrêmement forte", indique Florence Levard, la productrice à l'origine de la série : "Il n’y a rien de plus impressionnant que le mélange entre les dorures de Garnier, la beauté, la puissance des corps des danseurs, le faste de ce milieu de la danse que finalement on ne connait pas si bien. En même temps, on avait la possibilité, c’est essentiel pour faire une bonne série, de traiter des sujets de fond. Faire de l’Opéra une mini société française, se servir de cette arène spectaculaire pour traiter de sujets qui nous touchent tous."
Derrière la danse, une lecture sociale
Car au-delà de la restitution technique, la série propose également une lecture sociale. Le microcosme de l'Opéra permet d'aborder des sujets tels que l'âgisme : Zoé Monin, danseuse étoile, est poussée vers la sortie par sa hiérarchie, qui souhaite une "réforme" des étoiles. "Si mon personnage n’était centré que sur la danse, ce serait nettement moins intéressant pour les gens qui n’ont pas de lien direct avec ce milieu-là. Ce qui rend le rôle et la série beaucoup plus accessible, c'est que Zoé nous touche tous car elle incarne une problématique très actuelle : la question de la performance, d’être à la hauteur, ne pas avoir le droit d’avoir des faiblesses, ou d’être perdu des moments de notre vie… Ça nous parle à tous", juge Ariane Labed, son interprète.
L’Opéra est un miroir de la volonté d’excellence à la française, qui brille au firmament de la danse mondiale. Mais c'est aussi un miroir des freins, des blocages, et donc du potentiel de changement et de modernité, qui va être incarné notamment par le personnage de Sébastien, le directeur de la danse" - Florence Levard
La question des discriminations raciales est aussi traitée, à travers le personnage de Flora Soumaré. Représenter une jeune danseuse noire, à l'écran, est un acte déterminant pour Suzy Bemba, son interprète : "On traite de l’Opéra de Paris mais on traite surtout d’une institution française en général. On peut transposer le parcours de Flora à la Philharmonie, à l’Ena, à n’importe quelle autre grande institution française", explique-t-elle : "La problématique de Flora est de s’intégrer dans un monde qui ne lui ouvre pas les portes, dont elle n’a pas les codes. Son personnage traite d’intégration, de représentation et de racisme. C’est aussi pour ça que j’ai voulu ce rôle très fort."
Il faut que la représentation ne soit plus une question de quotas, mais devienne quelque chose de normal, que cela ne soit plus un sujet. Je pense que ça passe aussi par l’audio-visuel : représenter de jeunes filles noires. Mes nièces, encore toutes petites, qu’elles voient ça à la télé et qu’elles se disent que finalement, c’est possible. Le travail n’est pas à faire seulement au niveau des institutions mais aussi des consciences de tous" - Suzy Bemba
Tournage acrobatique
Le tournage de la série a été pour le moins acrobatique. "D’abord, parce qu’on a dû se mettre à la hauteur en terme de production de l’institution dont on parlait, l’Opéra de Paris. C’était un niveau d’excellence et d’exigence extrêmement élevé. Il y a eu ce gros challenge de filmer de la danse et de mettre en scène des ballets qui soient extraordinaires et impressionnants et de filmer l’institution alors qu’on a eu que quelques jours de tournage à Garnier", précise Florence Levard, la productrice. Le reste du tournage a eu lieu en Belgique, "dans un château désaffecté reconverti en opéra 'off', reconstitué pour l'occasion", ainsi qu'à l'Opéra de Liège.
C’était vraiment important pour nous de ne pas tourner en studio pour avoir cette crédibilité et cette impression de ruche qu’on a quand on pousse la porte de Garnier, avec dans le même ascenseurs des administratifs, des régisseurs, des danseuses en tutu, des costumières qui portent mille pourpoints" - Florence Levard
La productrice qui a bien en tête le potentiel international de la série. "On rêve d’un destin semblable à celui de la série Lupin. On se dit qu’il y a tous les ingrédients : la puissance de l’arène, la force du nom, la qualité d’écriture, de production, l’interprétation, des comédiens principaux extraordinaires...", égrène Florence Levard : "Dès le début on a pensé et conçu cette série comme ayant vocation à voyager dans le monde entier. On est déjà en discussion avec pas mal de diffuseurs internationaux. Rien de signé, mais tout ça est prometteur." Avec une saison 2 déjà en cours de tournage.
Programmation musicale
- 08h08
L'as des as : L'as des as Vladimir Cosma (Compositeur, Chef d'orchestre)L'as des as : L'as des asNon Identifié
Album BOF / L'as des as / L'animal / Cd 1 (2009)Label LARGHETTO MUSIC (LARGH005/1)
L'équipe
- Production
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