De plus en plus de musiciens, dont les morceaux sont écoutés des millions voire des milliards de fois sur la célèbre plateforme TikTok, s'estiment lésés. La faute à un modèle très peu avantageux.
Deux syllabes et un succès vertigineux : le réseau social TikTok compte plus d'un milliard d'utilisateurs à travers le monde. Une plateforme qui fait notamment fureur chez les jeunes puisque 40% des utilisateurs âgés ont entre 16 et 24 ans. Le principe : visionner, réaliser et partager des clips, au succès parfois viral. Pour cela, les "TikTokeurs" piochent dans un immense catalogue musical. Mais quid des musiciens, justement ? De plus en plus d'artistes, dont les morceaux sont écoutés des millions voire des milliards de fois, s'estiment lésés, non rémunérés à leur juste valeur. C'est donc tout un modèle qui pose question.
Des milliards d'écoute pour 600 euros
Exemple avec Funny Song, une chanson entêtante créée par le Britannique Thomas Hewitt-Jones. Un morceau devenu viral sur TikTok, écouté plus de 2 milliards de fois. Mais le porte-monnaie du compositeur n'en profite pas vraiment. "Je dois dire que je suis absolument ravi de l’attention qu’a reçue la chanson. Mais ce que je ressens, c’est qu’il n’y a pas assez de transparence sur les royalties. Car j’estime que sur TikTok, la musique donne le ton, et participe directement à la valeur de la vidéo", juge Thomas Hewitt-Jones.
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Depuis 2018, sa ritournelle a été utilisée dans 372 000 vidéos TikTok. À chaque réutilisation, il perçoit une petite somme. Problème : Thomas Hewitt-Jones n'a touché que 500 livres au total, soit un peu moins de 600 euros. La faute, en partie, aux maisons de disque et aux distributeurs, des intermédiaires trop nombreux : "L'inconvénient, c'est que chaque acteur touche un pourcentage. Et qu'à la fin, le créateur, lui, ne touche que quelques centimes ! Je ne me plains pas particulièrement de mon cas, je pense à la communauté des compositeurs. Il faut que le système soit un peu plus juste, car sinon, les gens ne peuvent pas créer."
Sa maison de disque, Cavendish Music, est d'accord : le modèle TikTok n'est pas le meilleur ami des artistes, en tout cas pas encore. "En ce moment, il y a un problème avec cette plateforme. Je pense que c’est le cas pour pour beaucoup de plateformes qui voient le jour : la rémunération, au départ, est très basse, et je pense que cela prend du temps pour trouver une solution. Il y avait le même genre de problème avec Spotify, et TikTok est une plateforme assez nouvelle", explique Joanna Gregory, responsable des opérations et de la stratégie du label. "Mais je suis d’accord pour dire que les paiements sont très très bas, et que c’est un problème sur lequel nous devrions nous pencher."
Nous transférons toute notre musique à un distributeur, qui fournit TikTok, Instagram, Facebook… Puis nous sommes rémunérés à chaque fois que la musique est utilisée dans une vidéo" - Joanna Gregory
Inventer un nouveau système plus égalitaire
La rémunération varie selon les labels. Un artiste d'Universal tirera plus de revenus TikTok qu'un musicien qui a signé chez un petit groupe d'indépendants et de la même façon, un artiste connu pourra plus facilement négocier sa part du contrat. Comment créer les conditions d'une rémunération plus égalitaire, sur TikTok mais aussi sur les autres plateformes ? "Il y a une vraie incompréhension, une vraie demande de rémunération supplémentaire. La question, c'est comment trouver un système qui ne profite pas aux plus riches, qui implique un meilleur partage de la valeur ?", interroge Sophian Fanen, journaliste pour LesJours.fr et spécialiste de l'industrie musicale.
Souvent, les artistes et maisons de disque qui se sentent un peu floués par le système sont aussi des structures qui ont trop d’intermédiaires entre eux et l’auditeur. Quand on a un agrégateur, un distributeur, un label, il y a trop d’argent qui fuit" - Sophian Fanen
"En Grande-Bretagne, typiquement, il y a un débat au niveau politique, au Parlement. L’une des pistes, et ça a été aussi une demande en France, c’est une part fixe de rémunération sur le streaming, poursuit Sophian Fanen, qu’il y ait une sorte de salaire minimum par stream. par écoute." S'il y a un avantage à TikTok, analyse Sophian Fanen, il ne réside pas tant dans la rémunération que dans un cercle vertueux : "Quand une chanson a un succès sur TikTok, il va y avoir des écoutes sur les plateformes de streaming classiques, Deezer, Spotify et compagnie. Il y a une sorte de boucle positive qui se crée, et les artistes qui ont une viralité sur TikTok vont en profiter sur l’ensemble des autres plateformes."
Programmation musicale
- 08h12
Moment musical en ut dièse min op 94 nº4 D 780 nº4 : Moderato Franz Schubert (Compositeur)Moment musical en ut dièse min op 94 nº4 D 780 nº4 : ModeratoRadu Lupu (Piano)
Album Schubert : Oeuvres pour piano (1982)Label Decca (417785-2)
L'équipe
- Production
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