La rentrée des conservatoires : les fermetures qui inquiètent

Pour les 160 élèves et 10 professeurs de l’école intercommunale de musique de Blaye, la rentrée n’aura pas lieu. Estimée trop chère pour le nombre de bénéficiaires, la communauté de communes a décidé de la passer sous le statut associatif. L’annonce de la fermeture avait mobilisé toute la région : 140 musiciens ont participé au concert de soutien organisé par l’association Fasilablaye :

«  Quand on ramène ça au nombre d'élèves, forcément ça peut paraître conséquent. Mais tous ces musiciens qui étaient formés à l'école de musique de Blaye, alimentaient les orchestres et des harmonies qui étaient à Blaye et dans les environs. Le territoire de la Haute Gironde est un territoire assez pauvre, il n'y a pas grand-chose et l'accès à la culture, c'est quelque chose d'important », explique Gilles Rudelle, musicien amateur et parent d’élève.

Claire, 17 ans, y prenait des cours de clarinette depuis ses 4 ans. Elle fait partie de plusieurs orchestres à Blaye et dans les environs : « Je suis triste. C'est un peu brutal comme décision quand même. Ils n'ont pas vraiment prévenu qu'ils allaient fermer notre école de musique. Ils l'ont annoncé en mars, elle a fermé en juin. »

En cette rentrée, Claire a de la chance : sa professeure continue à enseigner dans l’association dans la commune voisine qui a pris le relais de l’école de musique fermée, avec une antenne à Blaye. Mais ce n’est pas le cas de tout le monde.

« J'ai des amis qui font de la musique et qui n’ont pas nécessairement leur instrument à Blaye et qui doivent aller à Saint-Christoly. Ma petite sœur par exemple fait du violon, donc ça fait 20 minutes de route et c'est plus compliqué. »

Une rentrée également compliquée tant pour les professeurs, dont les trois quarts étaient contractuels et se retrouvent sans emploi, que pour les familles qui devront payer plus cher les cours de musique :

« L'offre sera réduite par rapport à ce qu'il y avait auparavant à l'école de musique de Blaye, on ne trouvera pas tous les instruments. En plus auparavant, avec l'école de musique intercommunale, le cursus complet : instrument, formation musicale et pratique collective, c'était 300 € l'année et maintenant avec l'école de musique associative, ça fera 500 €. Donc ça veut dire que, en termes d'accessibilité à l'enseignement de la musique pour tout un tas d'enfants, ça ne devient plus possible », ajoute Gilles Rudelle.

Le cas de l’école de musique de Blay n’est pas isolé, d’autres établissements sont menacés de fermeture en Alsace, en Gironde ou encore en Ardèche. Une situation préoccupante, selon Hervé Guignier, directeur du Conservatoire à rayonnement départemental de Chartres et vice-président du collectif  Enseignement artistique en mouvement.

« Lors de la crise Covid les besoins en matériel de protection, de désinfection et une baisse des recettes due au cours non dispensés a créé un surcoût pour la plupart des collectivités, et nous sommes un des seuls secteurs qui n’a pas bénéficié d’un plan de relance de la part de l’Etat. La crise énergétique qui pointe son nez pour plusieurs collectivités engendre un surcoût de plus de 40 à 50%  par rapport à la facture habituelle. La baisse du pouvoir d’achat est un vecteur à ne pas négliger. La plupart des structures ont peur de l’impact sur leur ligne budgétaire, on est quand même dans une crise de la filière qui devient assez importante. »

Une crise qui pourrait engloutir tout un réseau des pratiques amateur qui a mis des décennies à se mettre en place, alerte Gilles Rudelle. La mobilisation pour l'école de musique de Blaye a démontré l'attachement des musiciens amateurs à cette cause, poursuit-il. « Tout le monde se disait : aujourd'hui c'est Blaye qui se trouve dans cette situation, demain ça peut-être nous aussi. »