Les nominations d’étoiles à l’Opéra de Paris, un système « pas du tout démocratique »

À 28 ans, François Alu accède au titre suprême du ballet de l'Opéra de Paris, après sa prestation saluée de Solor, dans La Bayadère, de Noureev.
À 28 ans, François Alu accède au titre suprême du ballet de l'Opéra de Paris, après sa prestation saluée de Solor, dans La Bayadère, de Noureev. - Clément Buzalka
À 28 ans, François Alu accède au titre suprême du ballet de l'Opéra de Paris, après sa prestation saluée de Solor, dans La Bayadère, de Noureev. - Clément Buzalka
À 28 ans, François Alu accède au titre suprême du ballet de l'Opéra de Paris, après sa prestation saluée de Solor, dans La Bayadère, de Noureev. - Clément Buzalka
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Le 23 avril dernier, François Alu était nommé danseur étoile de l’Opéra de Paris. Dans la salle, les spectateurs n’attendaient que sa nomination au grade suprême du ballet. Pourtant, officiellement, la pression du public ne joue en rien dans le processus de nomination au grade d’étoile.

« J’ai le grand plaisir de nommer M. François Alu, danseur étoile ! » Samedi 23 avril, à l’issue de La Bayadère, de Noureev, l’entrée sur scène, après les saluts, d’Alexander Neef, directeur générale de l’Opéra de Paris, et d’Aurélie Dupont, directrice de la danse, a suscité une explosion de joie dans la salle. Car les spectateurs connaissent le protocole (et attendaient ce moment avec impatience), qui veut que le directeur général de l’Opéra de Paris annonce son choix pour la nouvelle étoile du ballet, à l’issue de la représentation publique. Son choix, et non le résultat d’un vote, ou d’une décision collégiale. « Ce n’est pas du tout un système démocratique. C’est le fait du prince », tranche Ariane Bavelier, journaliste et critique de danse au Figaro.

« Une fois qu’on est premier danseur, on attend le bon-vouloir du directeur, qui peut avoir des goûts propres. Les goûts de Noureev n’étaient pas ceux de Brigitte Lefèvre, qui n'étaient pas non plus ceux de Benjamin Millepied ou d’Aurélie Dupont. Il n’y a pas de règle, mais à un moment, on se dit “untel, il faut le nommer étoile sinon il va s’user”, parce qu’à un moment, il faut cueillir les gens en pleine lumière pour qu’ils y restent. On ne peut pas les renvoyer dans le corps de ballet, sinon ils découragent. Il faut savoir que certains danseurs donnent une telle lumière qu’il faut leur donner le droit de rayonner. »

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Une distinction secrète et exceptionnelle

Et ce choix, comment se fait-il ? Sur les coulisses des nominations, l’Opéra de Paris reste très discret. Car c’est un des rares événements de l’institution pour lequel il n’existe pas de jury, ni d’examen. « C’est vrai qu’à l’Opéra c’est un peu particulier, parce que c’est une institution où on passe beaucoup d’examens pour être quadrille, coryphée, sujet, premier danseur, témoigne José Martinez, ancien directeur de la Compagnie nationale de danse d’Espagne et danseur étoile à l’Opéra de Paris (plus en activité depuis quelques années) ; et après, c’est laissé au libre-arbitre du directeur artistique. C’est vrai que cela pourrait se faire avec un vote d’une assemblée, comme le reste des concours. Mais je pense que le directeur doit avoir ce pouvoir là car il dirige la compagnie et doit nommer les danseurs en fonction de sa propre vision de la compagnie. »

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On dit que la nomination comme étoile reste un secret jusqu’à l’annonce. Que son officialisation, devant le public, doit être une surprise. Comme quand le titre a été décerné à Paul Marque, en 2020, après un ballet en distanciel. Lors de la dernière série de La Bayadère, le public a mis la pression pour voir François Alu nommé. Pourtant, quand le principal intéressé a vu entrer sur scène Aurélie Dupont et Alexander Neef, il ne se doutait de rien. « Pas du tout, c’est à chaque fois une grande surprise quand on les voit arriver », se souvient François Alu. Moi, j’étais très concentré sur le spectacle, il y avait ma famille dans la salle, car c’était la dernière représentation et cela faisait longtemps que je n’étais pas monté sur la scène de l’Opéra de Paris, donc j’avais fait venir tous mes proches. Quand Alexander Neef et Aurélie Dupont sont arrivés, je me suis dit “wow, ça va peut-être arriver, ça va peut-être être le bon moment pour moi”, et c’est arrivé. »

« C’est un titre honorifique qui ouvre beaucoup de portes. Mais fondamentalement, il ne change rien à ce que je suis. Evidemment, je suis heureux, et je ne vais pas cracher dessus, je remercie l’institution de me l’avoir donné. Mais si je ne l’avais pas eu, ça n’aurait pas changé mes plans de vie, mes plans de carrière, et tout ce que je prévois de faire à l’avenir. Ce n’est que du plus ! »

Une consécration due au talent, évidemment, mais aussi à une place qui se libère parmi les étoiles en activité. Celle de Stéphane Bullion, qui quittera bientôt l’institution. Car à l’Opéra de Paris, les étoiles sont comptées. « Au moment où j’étais étoile en activité, se rappelle José Martinez, Hugues Gall, qui était directeur de l’Opéra de Paris, voulait réduire le nombre d’étoiles. C’est alors qu’ils ont décidé de ne nommer que les danseurs très très confirmés. »

L'invité du jour
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Chez François Alu, cette distinction vient récompenser un travail riche, acharné et passionné de plus de 18 ans à l’Opéra de Paris. Une façon aussi, peut-être, pour l’institution, de rappeler à l’artiste son attachement à Garnier, alors que François Alu a pris quelques distances, avec son show, Complètement jetés, ou sa participation à l’émission Danse avec les stars. Mais il nous l’assure, il ne se détourne pas pour autant de sa maison de cœur.

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