Dans le cadre du festival Détours de Babel, le public a pu assister à une représentation de "Äkä – Free voices of forest". Un spectacle qui fait cohabiter sur scène les polyphonies pygmées du groupe NDima, et un langage imaginaire, porté par la chanteuse Leïla Martial.
« Est-ce qu'il faut sortir de scène ou rester entre les deux premières chansons ? » Assis en tailleurs, carnet à la main, l’équipe de Äkä - Free voices of forest règle les derniers détails avant la représentation de demain. Ce spectacle, Leïla Martial, Remi Leclerc et Eric Perez l’ont conçu avec le groupe de chanteurs et chanteuses pygmées aka, Ndima. L’objectif était de faire naître un réel mélange de sons et d’expressions vocales, explique Leïla Martial. « On a essayé d’appréhender leur répertoire au maximum, d’entendre quelle était leur musique et puis de voir ce qu’on pouvait écrire par rapport à ça. Ça a été beaucoup de questions pour nous parce que les polyphonies aka fascinent énormément de musiciens, il y a déjà eu des choses de faites mais on les utilise plutôt pour les 'sampler', y ajouter sa propre voix. Là il s’agit de musique vivante, avec des humains. Donc il y a des histoires de dynamique, de relief et ça, ça se construit tel qu’on est. »
« Les pygmées aka n’ont pas la même conception de la musique »
Le groupe Ndima fait des tournées mondiales depuis 10 ans. Composé d'Angélique Manongo, Emilie Koule, Nadège Ndzala, Gaston Motambo et Michel Kossi, il est accompagné par Sorel Eta, son directeur artistique, et indispensable traducteur pour franchir la barrière de la langue. Une barrière linguistique qui n’était pas le seul obstacle à surmonter, nous raconte-t-il. « Les pygmées aka n’ont pas la même conception de la musique. Quand on regarde par exemple la structure d’un chant aka, dès il est entonné, il devient l’affaire de tous, et tout le monde s’arrête seulement à la fin du morceau. Ce qui n’est pas le cas des chants du répertoire de nos amis français. Il y a des 'breaks' à chaque instant. Cette façon de faire, quand on a travaillé avec d’autres personnes dans le passé ça mettait les pygmées mal à l’aise ! Mais ils sont en train de comprendre au fur et à mesure comment les Européens pratiquent leur musique ».
Une rencontre qui a pris le temps
Sur scène, les percussions, qui sont aussi corporelles, se joignent au chant, à la danse et aux effets de bouche. Pour un spectacle transculturel qui s’inscrit totalement dans l’ADN du festival Détours de Babel, où il est programmé. « Cette rencontre est assez exemplaire parce qu’elle a pris le temps », déclare son directeur, Benoît Thiebergen. Ce ne sont pas des musiciens qui se retrouvent trois jours avant et se disent qu’ils vont faire quelque chose ensemble. Leila Martial et les musiciens sont partis au Congo travailler, il y a eu un véritable échange humain. Une relation de personne à personne qui s’est construite, et c’est ce qui fait la beauté du projet, parce que ça transparait sur scène ».
Ce spectacle continue de prendre le temps. « On apprend à chaque représentation les uns des autres », déclare Leïla Martial. Des représentations sont prévues en France jusqu'au 22 avril. Le festival Détour de Babel a lui lieu jusqu'au 10 avril.
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