Le nouveau projet de l’association El Sistema opéra Méditerrannée en partenariat avec l’Opéra de Nice, l'opéra participatif Babel réunit sur scène 140 écoliers. Il est inspiré de deux idées fortes : l’écologie et l’inclusion. Suzana Kubik s’est glissée dans les coulisses des premières répétitions.
Les couloirs de l'Opéra de Nice résonnent des voix d'enfants ce matin-là : on rigole, on se chamaille, l’excitation est palpable parmi les élèves de quatre écoles niçoises et de l’école spécialisée du Château : toutes et tous s'apprêtent à découvrir la belle salle toute en dorures et en velours rouge dans laquelle ils vont chanter l’après-midi même pour la première fois devant un public.
« C’est les enfants de Babel ! Je chante et je fais les gestes, » nous explique Mohamed, 11 ans. « L’opéra parle un peu de nous, il nous représente bien…là on va apprendre de nouveaux pas, répéter quoi, » rajoute sa camarade Chimène.
Babel est un opéra participatif :140 enfants sur scène sont les protagonistes principaux de l'opéra et chantent du début à la fin, et les enfants du public participent pendant le spectacle sur quelques chansons, nous explique Magali Thomas, librettiste et metteure en scène. Pour la mezzosoprano, il était important que les enfants prêtent leurs voix au message écologique de l'opéra : « Babel raconte l'histoire d'un groupe d'enfants qui va accuser les adultes de détruire la planète et de leur voler leur futur. Donc tous les enfants vont partir en croisade à la rencontre des éléments pour essayer de les calmer et ainsi sauver la planète», explique-t-elle. Sensible au message chanté par les enfants, le photographe et militant Yann Arthus-Bertrand a parrainé le projet : ses clichés seront projetés lors de la création.
Mais pour l'heure, c'est Magali Thomas qui encadrera cette première répétition sur la scène de l'opéra de Nice : il faut enchaîner les airs appris en classe, appréhender l'espace, travailler le mouvement scénique. Et intégrer les élèves de l'école du Château, spécialisée dans l'accueil des enfants porteurs de handicap. Une petite dizaine participe au projet. Il y a des élèves non-voyants, atteints des troubles autistiques ou différents troubles de la santé, nous explique leur enseignante Hélène Barbarasse. Chanter sur scène avec leurs camarades, est une énorme fierté :
«Les élèves adorent, ils attendent avec impatience ce projet. J’avais un élève qui ne voulait pas chanter, maintenant il chante tout le temps. »
« C'est valorisant, ils peuvent suivre un projet comme les autres enfants, rajoute Valérie Burnouf, coordinatrice dans une Unité spécialisée d'inclusion Ulis. Elle a accompagné plusieurs enfants déficients intellectuels. Ce sont des enfants qui n'aiment pas se mettre en avant. Mais au fur et à mesure que le projet avance, ça devient beaucoup plus concret pour eux : on voit le lieu, l'opéra, on parle des costumes, on fait intervenir d'autres artistes, le projet prend sens. Et là, ils sont avec les autres, on ne les remarque pas », s'enthousiasme l'enseignante.
Un apprentissage musical intensif et un accompagnement des équipes pédagogiques
Depuis le début de l'année, Magali Thomas et le compositeur Sergio Monterisi, ont accompagné élèves et enseignants, aussi bien en milieu ordinaire que dans les classes spécialisées :
«Ces enfants n'ont aucune expérience musicale au départ. Donc, nous, on y va très régulièrement, on passe dans chaque école avec chaque classe, une après-midi par semaine. On donne aussi aux professeurs des tutoriels d'apprentissage. Tous les jours, les professeurs font travailler à peu près 1 h les enfants, donc il y a un travail d'oreille énorme. Et on travaille individuellement aussi avec les enfants.»
« On a donné la possibilité aux enfants d'amener les enregistrements à domicile, de pouvoir les répéter en famille. En classe aussi, quand il y a des moments libres, ils peuvent réécouter les chants, c'était un gros travail sur l'année, » rajoute Valérie Burnouf.
« C'est valorisant pour eux, ils peuvent suivre un projet comme les autres enfants. Ce sont des enfants qui n'aiment pas se mettre en avant. Mais au fur et à mesure que le projet avance, ça devient beaucoup plus concret pour eux : on voit le lieu, l'opéra, on parle des costumes, on fait intervenir d'autres artistes, le projet prend sens. Et là, ils sont avec les autres, on ne les remarque pas », s'enthousiasme l'enseignante. Elle ne voit aucun obstacle au fait d'inclure les enfants porteurs de handicap dans un projet scénique comme l'opéra Babel. Il suffit d'anticiper, conclut-elle : «Il faut accepter qu'un moment donné, ces enfants se trompent. Il faut accepter l'imprévisible.»
Une sensibilisation à la différence
Une fois toutes et tous réunis sur scène, ce sont les enfants qui trouvent les solutions pour intégrer leurs camarades des classes spécialisées, raconte Magali Thomas. « Il y a une vraie entraide. On sait par exemple que Mohamed ne voit pas. Alors tous les enfants se sont portés volontaires pour l'accompagner. Lorenzo s'est mis à lui expliquer ce qu'il est censé voir. Cette échange nous tient vraiment à cœur : de sensibiliser les enfants, mais aussi les parents et le public, qu'avec ces enfants différents on doit s'adapter. Cela leur apprend la responsabilité,» souligne-t-elle.
Initier les enfants à l'art lyrique ne se limite pas uniquement à un apprentissage musical intensif, estime Sergio Monterisi. L'opéra destiné aux enfants doit être le miroir de la société, «avoir un contenu social très fort et un message à faire passer.» Pour le compositeur, intégrer les enfants porteurs de handicap dans un projet qui parle de l'écologie, était une évidence :
«A la base de tout ça, il y a le thème de l'inclusion et de l'harmonie entre les différentes parties de notre société qu'on voit déjà dans la différence des écoles, de quartier, des origines et de religion parfois. Donc, le thème de l'inclusion et de la mixité et l'idée de lier les problèmes de sauvetage de la planète au fait de retrouver l'harmonie parmi les gens et parmi les enfants, est vraiment primordial. Si ce message arrive à toucher les jeunes, peut être peut-on nourrir l'espoir que cela sera fécond pour la société,» conclut le musicien.
L’opéra Babel sera créé le 21 juin. Les représentation du 21, 22, 23, 24 juin, destinées aux scolaires et ouvertes au public, auront lieu à la Deuxième scène La Diacosmie, et la dernière représentation, le 30 juin, aura lieu à l' Opéra de Nice.
Programmation musicale
- 08h10
Concerto pour mandoline en Sol Maj Gimo 58 : 3. Allegro DOMENICO CAUDIOSO (Compositeur)Concerto pour mandoline en Sol Maj Gimo 58 : 3. Allegro, RINALDO ALESSANDRINI (Chef d'orchestre), JULIEN MARTINEAU, CONCERTO ITALIANO
Album Come una volta (2018)Label NAIVE CLASSIQUE (V5455)
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