Concours de lutherie à la Philharmonie de Paris : talents d'aujourd'hui et de demain sur le devant de la scène

Les violoncelles sont entendus derrière un paravent pour garantir l'objectivité du jury.
Les violoncelles sont entendus derrière un paravent pour garantir l'objectivité du jury. - William Baucardet
Les violoncelles sont entendus derrière un paravent pour garantir l'objectivité du jury. - William Baucardet
Les violoncelles sont entendus derrière un paravent pour garantir l'objectivité du jury. - William Baucardet
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On en parle rarement et pourtant, ils sont les plus fidèles soutiens des instrumentistes ! Les luthiers font partie des métiers de l’ombre, ils étaient à l’honneur ce week-end à la Philharmonie de Paris.

A l’occasion de la biennale du quatuor qui clôturait sa dixième édition hier, la Philharmonie a organisé conjointement avec l’association Talents et Violon’celles un concours de lutherie. Soixante-sept violoncelles ont été examinés et testés lors d’un premier tour puis comparés à l’aveugle, derrière un paravent, par un jury de violoncellistes et luthiers. Ce jury était présidé par Raphaël Pidoux, fondateur de l’association qui prête des instruments aux jeunes musiciens en début de carrière… Aude Giger s’est rendue sur place pour tendre les oreilles !

« On se disait "ah ça c’est le nôtre... non c’est pas le nôtre..." Puis parfois on voyait un petit bout de vernis qui dépassait du drap et on se disait : "ça ne peut pas être le nôtre !" ».  Dans les étages du Musée de la musique, Elise Biron et Margot Lefébure, étudiantes à l’école de lutherie de Mirecourt dans les Vosges, commentent le ballet de violoncelles cachés par des housses noires à l’issue du second tour d’écoute à l’aveugle pour la catégorie des « Talents de demain ». Dédiée aux écoles de lutherie, elle est adossée à la catégorie talents d’aujourd’hui avec un thème imposé : la copie d’un violoncelle Goffriller abrité dans les collections du Musée de la Musique. « Par rapport au travail qu’on fait à Mirecourt, on voit que ce violoncelle a été plus rapidement avec des gestes sans doute rapides. On a essayé de se lâcher en faisant le violoncelle, en laissant des coups d’outils... des choses qu’on ne fait pas à l’école. »

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Le lendemain, c’est dans le studio de la Philharmonie que nous accueille Stéphane Vaiedelich, responsable du laboratoire de rechercher et de restauration du musée de la Musique pour l’épreuve consacrée cette fois-ci aux luthiers professionnels. Seulement quinze violoncelles ont été retenus, mais leur identité n’a pas été dévoilée. Arthur Frémont et Benjamin Molinaro, deux luthiers en compétition, aimeraient bien y retrouver leur ouvrage : « Il y a vraiment un instrument m’a beaucoup plu, et j’espère que c’est le mien, c’était le 22A. Je trouvais qu’il avais des basses très amples. » Pour ces deux luthiers, le concours illustre le dynamisme d’un marché qui a plutôt la cote : «  On a l’impression que le préjugé ancien de « le vieux c’est mieux » est en train de se gommer. Il y a plus d’objectivité. »

De l’autre côté du paravent, trois musiciens du pupitre de violoncelle de l’orchestre de Paris, chacun sur une œuvre différente, nous font entendre l’ensemble des instruments encore en compétition. Éric Picard, premier violoncelle solo de l’orchestre de Paris, évoque la difficulté de jouer directement dessus, sans chauffe préalable : « C’est un petit peu comme un cheval : soit vous le tenez de façon forte, soit vous le laissez aller. Quand on n’a même pas une minute avant pour avoir ces sensations, on est dans un état brut, c’est difficile. Techniquement c’est difficile, la production des sons est difficile, et en même temps c’est intéressant car ça révèle sans doute beaucoup la personnalité intrinsèque de l’instrument. »

Pour la violoncelliste et membre du jury Astrig Siranossian, l’exercice d’écoute s’apparente à une activité d’un autre genre : « la moitié de ma famille est dans le vin. j’ai eu l’impression de retrouver l’ambiance des dégustations à l’aveugle dans les verres noirs... les longueurs en son et les longueurs en bouche, les attaques ou le plaisir... il y a plein de choses, c’est tout à fait en relation. »

Au terme de trois jours d’écoute intensive, le jury s’est accordé sur une série de prix : le couple de luthier belgo Allemand, Mira Gruszow et Gideon Baumblatt, remportent le premier prix dans la catégorie « Talents d’aujourd’hui », tandis que le deuxième prix renvient au Français Alexandre Beaussart, installé à Vincennes. Lejla Fassler et Adrian Pfeiffer de l’école de lutherie suisse à Brienz ont convaincu le jury pour la catégorie « Talents de demain » : leur instrument sera acheté par le Musée de la musique pour 15 000 € et rejoindra la collection d’instruments fac-similés et pédagogiques ! De leurs côtés, les étudiants de l’école à Mirecourt et Arthur Frémont sont repartis avec le coup de cœur du jury luthier, chacun dans leurs catégories respectives...

Programmation musicale

  • 08h09
    Lakmé : Dôme épais le jasmin (Acte I) Duo Lakmé Malika
    Lakmé : Dôme épais le jasmin (Acte I) Duo Lakmé Malika
    Léo Delibes (Compositeur)
    Lakmé : Dôme épais le jasmin (Acte I) Duo Lakmé Malika

    François-Xavier Roth (Chef d'orchestre), Sabine Devieilhe (Soprano, Lakmé), Marianne Crebassa (Mezzo-soprano, Malika), Orchestre Les Siècles, Edmond Gondinet, Philippe Gille

    Album Sabine Devieilhe : Mirages (2017)
    Label ERATO (0190295767723)

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