Le Teatro de Manaus vient de fêter ses 125 ans et a lancé la semaine dernière la 23e édition de son festival d'opéra annuel. Pourtant, pendant longtemps, cette salle de spectacle construite au milieu de la forêt amazonienne n’a présenté quasiment aucune œuvre. Un reportage de Clawdia Prolongeau.
Sur la scène, on aperçoit la répétition générale d'un opéra pour enfants. De l’autre côté des murs, sont organisées des visites guidées et sur le parvis se tient Catherine, une touriste française, émerveillée. « J'ai été ravie de savoir que l'opéra était en service, puisque quand je faisais mes études, il était surtout connu pour ne jamais accueillir de spectacles. Là il est magnifique. On dirait une pâtisserie d'Europe de l'Est, rose et blanc cassé. C'est assez émouvant ».
L'opéras de Manaus, construit en 1896, n'a pas toujours été ce haut lieu de la culture brésilienne. Hélio Dantas, professeur d’histoire et historien, lui-même originaire de Manaus, a travaillé six ans aux archives du Teatro. Il raconte comment l'Amazonie, riche de ses exportations de caoutchouc, a eu les moyens d'une telle ambition à la fin du XIXe siècle, et pourquoi : « Le théâtre, comme l'opéra, étaient vus comme des éléments d'éducation mais aussi comme un signe distinctif de civilisation. Une volonté de montrer qu'ici nous avons une élite culturelle raffinée, avec les même valeurs esthétiques et artistiques qu'en Europe »
Excepté le bois, tous les matériaux utilisés pour la construction et la décoration du Théâtre viennent d'Europe. Le pierres proviennent d'Angleterre, la structure de la coupole de Belgique et les tuiles colorées qui la recouvrent, de France. Avec pour deux grands modèles, la Scala de Milan et l'Opéra Garnier à Paris. « Il y avait aussi une volonté très grande de faire une sorte de synthèse entre cette culture européenne et la culture locale. Le grand salon montre cela avec ses grandes peintures qui représentent la faune et la flore amazonienne. »
Pendant les premières années de sa vie, le Teatro Amazonas propose de nombreuses représentations. Mais quand la ville perd le monopole de la production de caoutchouc, et la richesse qu'elle lui procurait, elle perd du même coup une grande partie de sa vie culturelle. Il faudra attendre 1997 et la volonté politique de redonner à Manaus ses lettres de noblesse, avec la création d'un Orchestre philharmonique de 76 musiciens, puis de son festival annuel d'opéra, pour que Manaus recommence alors à attirer les foules, et notamment les musiciens européens comme Judith Simon. Hautboïste allemande, elle est arrivée ici il y a dix ans. « Je me souviens que j'avais lu des choses sur cette orchestre à Manaus, au milieu de l'Amazonie. Jamais de la vie je n'aurais imaginé qu'un jour je serais ici, que je jouerais dans cet orchestre et que je vivrais ici. Mais cette opportunité s'est présentée et j'ai pensé bon, allons voir comment c'est. Et c'est magique d'arriver ici, on voit ce théâtre avec sa coupole colorée, c'était vraiment un moment spécial ».
Ces prochains jours, comme chaque année à l'occasion du Festival Amazonas Opera, Judith Simon et ses collègues joueront des classiques du répertoire mais aussi des compositeurs brésiliens et plus particulièrement amazoniens.
Programmation musicale
- 08h08
The Artist : Fantaisie d'amour Orchestre Philharmonique De BruxellesThe Artist : Fantaisie d'amourErnst Van Tiel (Chef d'orchestre), Ludovic Bource
Album BOF / The Artist (2011)Label SONY
L'équipe
- Production
- Autre