C'est avec la boule au ventre que vingt-et-un danseurs et danseuses du Grand Ballet de Kiev terminent leur tournée française, entamée le 3 janvier. Reportage et témoignages.
C'est avec la boule au ventre que vingt-et-un danseurs et danseuses du Grand Ballet de Kiev terminent leur tournée française, entamée le 3 janvier. Inquiets pour leur pays, leurs proches, depuis l'assaut lancé par Vladimir Poutine sur l'Ukraine jeudi dernier. Leur vol de retour étant annulé, la troupe se dirigera vers la Pologne, pour dix représentations. Et après, aucune certitude. France Musique a assisté mardi soir soir à l'avant-dernière date française à Rouillac, en Charente, pour un Lac des Cygnes à la tonalité forcément particulière.
L'exil ou le retour
Ils sont en train de s'étirer, de s'échauffer. Ils ont entre 19 et 36 ans, les gestes précis des danseurs professionnels mais l'esprit ailleurs, vers l'Ukraine, comme Anatole Khandajevsky : "Je suis très inquiet. Souvent je n'arrive pas à bien manger, à bien dormir." Sa femme et ses deux enfants étaient mardi à Kharkov, la deuxième ville du pays, où 18 personnes sont mortes hier sous les bombes : "Hier, elle a réussi à quitter la ville de Kharkov, et est aujourd'hui en Pologne. À mon avis, revenir en Ukraine n'a aucun sens." Le jeune danseur compte rester en Europe*,* "pourquoi pas en France ou en Espagne", confie-t-il.
Mais certains danseurs veulent coûte que coûte regagner l'Ukraine. Un couple de la compagnie est déjà reparti, pour retrouver son enfant âgé de 6 mois. Natalia Kostogrise compte leur emboîter le pas dès que possible : "Nous allons tourner un peu en Pologne et ensuite je veux à tout prix retourner chez moi, rejoindre mes proches. En Ukraine, j'ai mon mari, mon fils, ma soeur...", égrène-t-elle, les yeux humides à l'évocation de sa famille.
Élans de solidarité
Notre interprète, Yuri Kovalev, le gérant de la tournée, a les traits tirés, depuis l'appel reçu à 4h du matin jeudi dernier pour le prévenir de l'assaut des troupes russes. Heureusement, en ce moment, les coups de fil sont plus encourageants. "Je viens d'avoir le ballet de l'Opéra de Paris au téléphone", dit-il : "Ils ont dit qu'ils étaient prêts à aider la troupe, à débloquer des moyens financiers. La solidarité joue en ce moment, ça me fait chaud au coeur. D'autant plus que la culture peut aussi contribuer à la paix."
Dehors, des techniciens s'affairent. Joël Breton dirige l'association La Palène à Rouillac, qui accueille régulièrement la compagnie : "Mon équipe est en train d'éclairer le bâtiment aux couleurs du drapeau de l'Ukraine. On ne va pas aller plus loin, car ils ne souhaitaient pas forcément qu'on disent un mot ou qu'il y ait une minute de silence. Je pense que si j'étais à leur place, je serais à peu près dans le même état d'esprit, de se dire que moins on y pense, mieux c'est. Parce que dès que l'on y pense, on s'affole." Et les spectateurs sont venus en nombre de Rouillac et des alentours. Venus, disent-ils, pour la qualité, la réputation du Grand Ballet de Kiev. Mais aussi par solidarité.
La dernière représentation française du Grand Ballet de Kiev se tiendra ce mercredi soir à La-Teste-de-Buch, en Gironde.
Programmation musicale
- 08h08
Prélude et fugue en sol min BWV 535 - arrangement pour piano Jean Sebastien Bach (Compositeur)Prélude et fugue en sol min BWV 535 - arrangement pour pianoNelson Freire (Piano), Alexander Siloti
Album Nelson Freire interprète Bach (2016)Label Decca (4788449)
L'équipe
- Production
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