

Ils dormaient dans un grenier à St-Michel-sur-Orge au domicile d'un ancien prisonnier du Stalag IV-C. Découverts il y a quelques années, ces disques ont été confiés par les nouveaux habitants à Henri Chamoux qui les a numérisés. Ces enregistrements inédits sont maintenant accessibles au public.
L'histoire de cette découverte
Nous essayons dans cette chronique de jeter régulièrement un peu de lumière sur les héros discrets de la musique que sont les musicologues. Il a été posté cette semaine un message sur le serveur MusiSorbonne. Henri Chamoux, docteur en histoire, médaillé du CNRS et enseignant à l’ENS de Lyon, nous invitait à découvrir son travail de numérisation de disques réalisé il y a quelques mois, durant le confinement. Ces disques ont été gravés entre 1943 et 1944 à Wistritz, dans la région des Sudètes, au nord de l’actuelle République Tchèque, lieu du Stalag IV-C.
Tout commence avec un grenier
Cette découverte commence avec le fantasme de tous les historiens et de tous les musicologues, à savoir : avec une pile de documents historiques oubliés dans un grenier, à Saint-Michel-sur-Orge, dans l’Essonne. Nous sommes en 2003 : Élie-Jean Pascaud (né en 1908) décède et laisse derrière lui sa maison à la famille Moreira. Élie-Jean Pascaud, soldat français, est devenu en 1940 : prisonnier n°34288. Il est envoyé en août 1941 au Stalag IV C. Libéré en 1945 par les Russes, il ramène avec lui sur Paris les archives du camp, dont certaines termineront dans son grenier à Saint-Michel-sur-Orge.
Parti timidement, contraint et forcé pour 'la Grande Aventure' le 1er septembre 1939, réintégra discrètement ses pénates, en catimini, fauché et sans situation, le 24 février 1946, date à partir de laquelle il devint - fatal et curieux destin - 'prisonnier de sa captivité', affection envahissante dont il ne devait jamais guérir. (Élie-Jean Pascaud à propos de lui-même)
A sa mort en 2003, les nouveaux habitants découvrent dans le grenier les archives du Stalag IV-C, en grande partie détruites par les couvreurs qui réparent la toiture et qui jettent à la poubelle 11 000 fiches d’identité de prisonniers. Un voisin a néanmoins réussi à sauver in extremis un mètre linéaire d’archives qui sont maintenant aux Archives Nationales.
Une pile oubliée de disques
On découvre entre-temps une pile de disques dans ce grenier, miraculeusement oubliés (donc laissés tranquilles). Loïc Pinçon-Desaize, historien spécialiste du Stalag IV-C, a contacté Radio France pour faire numériser ces disques datant de 1943 et 1944. Il lui a été conseillé de s’adresser à Henri Chamoux, l'interlocuteur pour cette chronique, spécialiste des numérisations d’enregistrements anciens, qui les numérisés en juin dernier.
Le contenu de ces disques
Il s'agit d'un témoignage extrêmement précieux sur la vie culturelle dans le Stalag IV-C. L’extrême difficulté des conditions de vie dans ces camps de travaux forcés n'est pas inconnue, mais il faut savoir que pour y survivre, il a été vital d’y monter des pièces de théâtre, d’y écrire de la poésie, et d’y jouer de la musique. On trouve donc dans cet ensemble unique une quarantaine de disques du jazz, de l’opérette, de la musique de chambre et des déclamations de poèmes rédigés en détention.
Nous sommes très touchés d’avoir l’honneur de vous diffuser cet Aria de Jean-Sébastien Bach, joué par un certain Bernaert au piano, et par Léon Ferreri au violon.
Cet enregistrement n’a donc pour ainsi dire pas été entendu du public depuis 1943.
L'extrait est à écouter dans la chronique (cliquer sur "play" en haut à gauche de cette page, à côté du titre)
Nous tenons à saluer le travail du Laboratoire de Recherche Historique Rhône Alpes et surtout d'Henri Chamoux, l’inventeur de l’archéophone qui permet de numériser sans abîmer, et qui a fait ce travail de sauvegarde de ces disques “pyral” extrêmement fragiles.
Voici le lien vers les enregistrements de ces disques du Stalag IV-C sur le site phonobase.org
Programmation musicale
- 09h52
Liga garoufala Manos LoizosLiga garoufalaAlbum Grammata stin agapimeniLabel EMI GREECE
L'équipe
- Production