Tendez l'oreille ! Quand 4 sirènes anti-tornades s'harmonisent accidentellement

Quatre sirènes anti-tornades forment accidentellement un accord
Quatre sirènes anti-tornades forment accidentellement un accord - Capture d'écran YouTube
Quatre sirènes anti-tornades forment accidentellement un accord - Capture d'écran YouTube
Quatre sirènes anti-tornades forment accidentellement un accord - Capture d'écran YouTube
Publicité

Pour ce premier "Tendez l'oreille !" de la saison, Christophe Dilys part d'un fait divers assez banal à Iowa City et en profite pour mettre un nom sur un principe assez répandu, à savoir que le cerveau est capable d'interpréter un bruit comme étant de la musique : l'apophénie.

Extrait 1 - BOF de Twister (Mark Mancina)

Le 27 avril 2019, nous étions partis d’un reportage télévisé pour expliquer la naissance de l’opéra. que la personne interrogée parlait comme ceci :

Publicité

Extrait 2 - Michelle Dobyne interrogée

En prenant la mélodie de sa voix, nous avions vu que, sans la changer, nous pouvions en faire de la musique, comme ceci :  

Extrait 3 - Michelle Dobyne harmonisée

Et aujourd’hui, vous allez faire pareil. Cela s’est passé cette semaine à Iowa City aux Etats-Unis, et l’histoire est simple : un jeune homme a posté il y a quelques jours une vidéo qui depuis a fait le tour de la toile : il s’est filmé dans la rue, et il se trouve qu’il était au croisement de quatre quartiers. Il était donc à portée d’oreille de quatre sirènes anti-tornades. Voilà ce que ça donne.

Extrait 4 - Quatre sirènes anti-tornades

C’est un faux, non ? Effectivement : comment quatre sirènes peuvent-elles produire cet accord, ce son un peu éthéré et si musical ? Beaucoup pensent que c’est faux, mais les habitants d’Iowa City confirment : cela ne se produit pas tout le temps mais quand même assez régulièrement. Ces quatre sirènes produisent de temps en temps cet accord. Depuis, cette vidéo excite les musiciens, certains profitent de cet accord pour improviser à la trompette par dessus. 

Extrait 5 - improvisation trompette

Nous avons essayé de reproduire le son, pour s'assurer que c'est bien possible. Après plusieurs dizaines d’heure cette semaine à écouter, répertorier, classer par hauteur de notes des sirènes anti tornades pour reproduire l’expérience, nous en avons choisi quatre pour reproduire un accord assez similaire. Nous avons fait l’expérience avec des personnes avant la chronique qui le confirment : cela commence en étant un bruit (le temps que les quatre sirènes se lancent), et, à un moment, pendant quelques secondes, les sirènes trouvent leurs notes, s’harmonisent entre elles, et ce bruit devient musique… avant de redevenir très vite du bruit, écoutez bien.

Extrait 6 - expérience avec quatre sirènes

… et la musique redevient bruit sur la fin. Comment cela se fait ? Le cerveau est câblé pour interpréter les signaux visuels ou sonores d’une façon qui fasse sens pour lui. Si vous voulez, c’est le même principe que le fait de voir des visages humains dans les façades des maisons ou sur la Lune, ou de voir des Jésus dans du pain grillé. 

Et il y a un mot grec pour ça. Voire deux : la paréidolie auditive, si on veut transposer le phénomène visuel vers le monde de la musique, ou plus simplement l’apophénie qui est plus généralement le fait d’interpréter et de donner un sens à un assemblage chaotique d’informations : dans notre cas, les quatre sirènes forment PLUS qu’un simple accord, elles forment de la musique.

Evidemment, tout ceci n’est pas à confondre avec le fait d’écrire de la musique qui utilise du bruit… mais nous pouvons quand même poser la question : est-ce que City Life, de Steve Reich, grand poème musical du XXe siècle qui utilise les bruits de la ville pour en faire des sons musicaux, n’est pas pour Steve Reich… une façon de nous aider à percevoir ce que lui perçoit ? Finalement, est-ce que City Life n'est pas une façon pour Steve Reich de nous faire écouter le monde tel qu'il le perçoit, c'est-à-dire entièrement musical ?

Extrait 7 - City Life (Steve Reich)

L'équipe