Première représentation d'un opéra étranger au Turkménistan après 19 ans d'interdiction
Par Victor Tribot LaspièrePour la première fois depuis 19 ans, un opéra étranger a été joué à Achkhabad, la capitale du Turkménistan. Ce pays autoritaire d'Asie centrale avait interdit cette forme d'art qu'il jugeait « incompatible avec la mentalité turkmène ».
Cela faisait 19 ans qu'aucun opéra, ni ballet étranger n'avait été joué au Turkménistan. Mardi 19 novembre, le théâtre d'Etat d'Achkhabad a rompu ce long silence en présentant sur sa scène Pagliacci, un opéra du compositeur italien Ruggero Leoncavallo (1857 - 1919). Un événement dans ce pays autoritaire d'Asie centrale.
« Pendant près de deux décennies, il nous manquait tout un pan de la culture. J'ai attendu ce jour tellement longtemps », a déclaré à l'AFP une spectatrice, Anna Krasnova, 59 ans. Le premier président du Turkménistan indépendant, Saparamourat Niazov, décédé en 2006, avait banni en 2001 les opéras et ballets étrangers dans ce qu'il a présenté comme un effort pour protéger la culture turkmène. Il y voyait une forme d'art « incompatible avec la mentalité turkmène ».
Les autorités n'ont donné aucun signe laissant entendre que le ballet allait être réintroduit dans le pays, l'un des plus fermés au monde. Le successeur de Niazov, Gourbangouly Berdymoukhamedov, a maintenu de nombreuses politiques restrictives adoptées avant son arrivée au pouvoir en 2006 et jouit lui aussi d'un puissant culte de la personnalité. Dans les esprits turkmènes, ces formes d'arts sont intimement liées aux périodes de domination russe et soviétique.
Le théâtre d'Etat d'Achkhabad était noir de monde pour la première représentation de l'opéra de Leoncavallo. D'autres événements doivent avoir lieu dans le cadre d'un « festival international de la culture ». Daniele de Plano, le metteur en scène, a précisé que Pagliacci était donné dans le cadre d'un « programme d'échange culturel » entre l'Italie et le Turkménistan. Il s'est dit « honoré d'être le premier metteur en scène à ramener l'opéra » dans cette ex-république soviétique.
« J'espère que c'est le début d'une nouvelle voie faite de liens plus étroits entre le Turkménistan et l'opéra, en particulier l'opéra italien » a-t-il ajouté. Sur la scène, le ténor italien Francesco Anile, et des chanteurs turkmènes, comme la soprano Bibijemal Amanova, le baryton Ismail Jumayev ou le ténor Nury Nurryev. Dans la fosse, l'Orchestre symphonique national du Turkménistan, dirigé par Resul Klychev.
avec AFP