Sur une chaîne russe, Boris Berezovsky cautionne avec une grande violence la guerre en Ukraine

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Sur une chaîne russe, Boris Berezovsky cautionne avec une grande violence la guerre en Ukraine

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Boris Berezovsky est régulièrement invité dans les festivals et sur les scènes internationales
Boris Berezovsky est régulièrement invité dans les festivals et sur les scènes internationales
© AFP - Valeriy Melnikov

"Je comprends que nous ayons pitié d’eux, nous sommes très délicats, mais ne pourrions-nous pas être plus radicaux?", s'est notamment interrogé le pianiste russe, invité d'un talk-show.

La scène, à peine croyable, s'est déroulée jeudi dernier sur la chaîne de télévision russe Russian One. Invité sur le plateau d'un talk-show de propagande, le pianiste Boris Berezovsky a cautionné avec une grande violence l'invasion de la Russie en Ukraine. "J’ai une question un peu naïve. Je ne connais pas grand chose à la guerre, je suis juste un musicien, il y a un militaire juste à côté de moi (sur le plateau, ndlr). [...] Je comprends que nous ayons pitié d’eux, nous sommes très délicats, mais ne pourrions-nous pas être plus radicaux, les encercler et leur couper l’électricité ?"

"Ils n’ont déjà pas l’électricité", rétorque alors le militaire debout à côté de lui. "Je veux dire, à l’ouest, à Kiev", poursuit Berezovsky (à 7m40 dans la vidéo). "Mais nous ne devrions pas entraîner une catastrophe humanitaire", réplique l'officier. "Ce qu’il faut surtout, c’est gagner cette guerre, et tout ira bien ensuite", conclut le pianiste. Ce dernier estime également que l'Occident et les États-Unis sont responsables de la situation actuelle en Ukraine.

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Forcément, les proches du pianiste prodige tombent des nues. "J’ai vraiment été choqué, et aussi furieux, je dois dire. Il a toujours été un peu fou, mais d’une manière 'charmante' jusqu’à maintenant", réagit notamment au micro de France Musique Lars Vogt, pianiste et chef de l'Orchestre de Chambre de Paris, qui connaît Boris Berezovsky depuis 30 ans. "Je comprends absolument que des artistes en Russie refusent de s’exprimer sur la situation, car il y a des pressions. Mais aller dans un studio de télévision et dire des choses comme ça… Non, ça, je ne le comprends pas." "Notre amitié est officiellement terminée", a-t-il en outre déclaré sur Twitter.

"Ce que je vois et ce que j’entends, c’est juste insupportable. Ça nous a presque tous, les collègues, la profession et au-delà, mis très mal à l’aise", rapporte également François-Frédéric Guy, qui fréquente Boris Berezovsky depuis 20 ans dans les festivals, avec qui il entretient une relation cordiale. "Bien sûr, nous sommes tous conscients qu'il pourrait y avoir eu des pressions, contre sa famille notamment, au vu des événements de l'an dernier. Le premier réflexe est de ne pas y croire", confie le pianiste. "Mais finalement, quand on revoit les images, je trouve que les mots choisis ne laissent guère de doute. Pour moi, ces mots ne ressemblent pas à des mots prononcés sous la pression. C’est très détaché, sur un ton légèrement badin, qui m’a mis très mal à l’aise. Cela sonne faux pour quelque chose qu’il aurait été obligé de dire."

"Cela ne veut pas dire que je cautionne cette guerre"

Boris Berezovsky a depuis réagi dans un communiqué, publié ce mardi, où il revient sur ses propos. "J’ai forgé mon opinion en consultant ces dernières semaines les politologues américains et occidentaux expliquant pour beaucoup que l’Occident est également responsable de la situation dramatique actuelle. Cela ne veut pas dire que je cautionne cette guerre ou n’importe quelle guerre", dit-il.

Le pianiste poursuit : "Mon intention sans doute naïve, en participant à cette émission, était de débattre pour évoquer les solutions possibles pour que ce drame actuel s’arrête dans les meilleurs délais. Lorsque je demandais la possibilité de coupures d’électricité, mon intention était d’éviter le choix des bombes sur Kiev et ainsi éviter une catastrophe humanitaire encore plus dramatique. Mais j’ai été interrompu et n’ai pas pu aller au bout de mon propos. Je resterai donc dorénavant silencieux sur toutes les questions qui ne concernent pas mon art." Et de conclure : " 'Quand les canons retentissent, les muses restent silencieuses.' J’aurai dû suivre ce sage adage."

Le pianiste a depuis perdu le soutien de son agence artistique Productions Sarfati. Dans un communiqué publié le jeudi 17 mars, l’agence a indiqué qu’elle ne représenterait plus le pianiste russe en raison de ses propos :

« Notre bureau, représente le pianiste Boris Berezovsky, artiste de génie et homme de paradoxe, depuis près de 20 ans le suivant pas à pas dans sa carrière. […] Nous condamnons avec virulence les propos tenus lors de son intervention, et sommes, hélas, dans l’obligation de suspendre la représentation de Boris Berezovsky au sein de notre bureau » a indiqué l’agence dans un communiqué.

La chronique d'Antoine Pecqueur
4 min