Trop de places offertes, hausse des frais : la Cour des comptes épingle l'Opéra-Comique
Par Louis-Valentin Lopez
Selon les magistrats, les nombreuses places offertes entraîneraient un gros manque à gagner. La salle Favart se justifie.
L'Opéra-Comique serait-il un peu trop généreux dans la distribution de ses invitations ? C'est en tout cas ce que souligne la Cour des comptes, dans un rapport qu'a pu consulter La Lettre A. Les rapporteurs ont épluché les dépenses de la salle Favart entre 2005 et 2018. Ils y pointent des largesses dans l'attribution de places gratuites, dont auraient notamment bénéficié "d'anciens, voire de très anciens ministres de la Culture", ainsi que "d'anciens membres de cabinet et des cadres privés qui ne sont pas mécènes". Sans oublier des personnalités du monde de la culture, "tous amoureux de l'art lyrique mais tous aussi en mesure de payer leurs places, y compris pour leurs accompagnants", observe la Cour des comptes.
En 2018, par exemple, 5 351 places ont été offertes par la direction. Cela représente 7,8% des sièges, souvent les mieux placés et donc plus chers. Conséquence : un manque à gagner de 28% sur les recettes des spectacles de l'Opéra-Comique, selon les rapporteurs. En plus des invitations généreuses, ces derniers notent une hausse de 50% des frais du personnel entre 2005 et 2018, à effectif constant.
"Il fallait redonner de la visibilité à l'Opéra-Comique"
À l'Opéra-Comique, le rapport fait grincer des dents. La direction souligne d'abord le fait qu'il n'était pas censé être rendu public, et justifie les nombreuses invitations : "À la réouverture du théâtre en 2017, après deux années de fermeture, il fallait redonner de la visibilité à l’Opéra-Comique, à Paris, en France et même au-delà des frontières, auprès de la presse, des coproducteurs français et étrangers potentiels et des mécènes." L'objectif, indique la salle Favart, était de regagner un public et de nouveaux partenaires. Passé ce besoin d'attirer à nouveau un public, le nombre d'invitations gratuites a baissé, et ces dernières ne représentent plus aujourd'hui que 5% des places environ.
Les ressources propres, billetterie, mécénat et recettes de coproductions, ont augmenté de 40%" - l'Opéra-Comique
Quant à la masse salariale, également visée par l'État, elle a augmenté "en proportion de l'activité du théâtre, qui est passée de 7 à 10 mois à partir de 2017", précise l'Opéra-Comique, dirigé depuis 2015 par Olivier Mantei. La grille des rémunérations, elle, n'a pas été révisée depuis 1985.