L'affaire Kéziah : un militant anti-chlordecone, victime de violences policières
Par Team Mouv'
Kéziah est un étudiant de 22 ans, militant actif, il a été gravement blessé par la police lors d'une manifestation publique à Fort-de-France le 16 juillet.
En matière de violences policières, les histoires se ressemblent et se répètent, et pourtant derrière ces noms, des histoires et des problématiques complexes. Kéziah Nuissier est un étudiant en licence d'anglais, il est âgé de 22 ans et milite aux cotés d'associations dénonçant l’empoisonnement au chlordecone, des populations, de l’eau et des terres aux Antilles françaises .
Une manifestation qui tourne mal
L'étudiant se rend le 16 juillet, à une manifestation publique à Fort de France devant le commissariat de Police, il s'agit d'un rassemblement pacifique en soutien à 3 militants anti-chlordecone, arrêtés plus tôt par la police. Le jeune homme est tambourineur spécialiste du "bèlè" (musique traditionnelle martiniquaise) et percussionniste. Il est accompagné par sa mère, chanteuse de "bélé" et militante.
Selon son avocat, Maitre Dominique Monotuka, une patrouille mobile de gendarme aurait voulu récupérer le tambour, la mère de Kéziah aurait été frappée, l'étudiant s'est alors interposé, puis, il aurait été victime de plusieurs coups de matraque et d'insultes racistes avant d'être conduit au poste de police.
C'est alors que deux versions s'opposent : celle de Kéziah et celle des forces de l'ordre. Des vidéos circulent sur les réseaux, on voit Kéziah gravement blessé à la tête, menotté et traîné derrière un fourgon. Cette arrestation provoque alors des émeutes à Fort-de-France dans la nuit du 17 au 18 juillet 2020. Une mobilisation émerge, dont celle de la chanteuse Meryl qui change sa photo de profil :
Kéziah prépare sa défense, Maître Dominique Monotuka porte plainte pour tentative de meurtre, actes de torture et de barbarie et insultes publiques à caractère raciste. Le procureur de la République saisit l'inspection générale de la Gendarmerie nationale.
Le chlordecone : un scandale sanitaire
Le chlordecone est un pesticide toxique, persistant et un perturbateur endocrinien. Interdit dès 1976 aux États-Unis, son autorisation de vente en France fut retirée en 1990, et pourtant il continue d’être utilisé jusqu'en 1993. Connu pour ses effets désastreux sur la santé et l’environnement :
"95 % des Guadeloupéens et 92 % des Martiniquais ont été contaminés par le pesticide."
Malgré la reconnaissance par l’État français de sa pleine responsabilité dans l’empoisonnement au chlordecone, aucune démarche d’ordre pénale et financière n’est à l'ordre du jour. De très nombreuses plaintes sont déposées pour que la population obtienne réparation. Un appel au boycott et des rassemblements contre les enseignes identifiées comme appartenant aux responsables sont organisés. Les tensions sont fortes et s’accentuent, le chlordécone se présente comme un révélateur d'inégalités systémiques.
Concernant Kéziah, la procédure se poursuit, ses avocats ont obtenu la levée du contrôle judiciaire initialement imposé au jeune homme. Son procès aura lieu le 27 août.